Au milieu des années 1990, Le Grand Secret, le livre de Claude Gubler – docteur de François Mitterrand – dans lequel il expose l’état de santé de l’ancien président, est diffusé sur Internet malgré son interdiction en France. En réaction, le mythe d’un « Internet zone de non-droit » [1] apparaît comme élément de langage dans les discours médiatique et politique pour ne plus jamais les quitter, de « l’amendement Fillon » de 1996 [2], qui tentait – en vain – d’imposer un filtrage administratif des contenus, à la loi « terrorisme » de Bernard Cazeneuve [3] fraîchement adoptée qui valide leur blocage extra-judiciaire, en passant par « l’Internet civilisé » cher à Nicolas Sarkozy. Indépendamment des couleurs politiques des pouvoirs exécutif et législatif, l’expression accompagne toutes les mesures de restriction, de contrôle et de surveillance des activités en ligne, justifiées cycliquement par l’un ou l’autre des cavaliers de l’infocalypse – terrorisme, blanchiment d’argent, pédo-pornographie, drogue, etc. Et chaque fois, expert·e·s et défenseur·se·s des libertés rappellent inlassablement le principe de territorialité du droit, les lois permettant déjà de répondre au nouveau fait divers invoqué et les exemples démontrant leur application réelle, les censures du Conseil Constitutionnel lors des précédentes tentatives législatives avortées, l’inefficacité des dispositifs proposés, les propositions alternatives et positives, etc. [4]
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